On vous a parlé la dernière fois du désert de sel d'Uyuni, notre goût nous a ensuite portés à Sucre, avec auparavant une étape de plusieurs jours à Potosi. On s'est acclimatés à l'altitude en mâchant des feuilles de coca, comme les locaux. Comme les locaux aussi, on s'est régalés de copieux almuerzos (entrée, soupe, plat, dessert) pour 1,50 euro maximum : à Sucre (comme à Potosi d'ailleurs), les additions ne sont pas très salées...
Plus sérieusement, dès notre arrivée en Bolivie, on a ressenti un gros décalage avec le Chili, bien plus riche. Exemple assez frappant : en nous promenant dans les rues, on vu à plusieurs reprises d'interminables files d'attente de gens patientant des heures devant les bureaux de la Western Union pour recevoir de l'argent envoyé par leurs familles...
Le pays est aussi très marqué par la culture indienne et 30% de la population ne parle pas l'espagnol... Dans les rues animées des villes, on voit partout des cholitas, femmes aux longues tresses, habillées traditionnellement avec chapeau melon, jupons bouffants, tablier, châle en laine et sur le dos, l'aguayo, un rectangle de tissu aux couleurs vives qui sert à porter toutes sortes de choses, des victuailles jusqu'au bébé ! Pour approfondir le sujet, on a visité un musée du textile à Sucre, où l'on a admiré les techniques ancestrales complexes des tisseuses de l'Altiplano.
Autres pans de la culture bolivienne : la musique et la danse. Lors d'une visite au cloître San Felipe Neri de Sucre, reconverti en collège, on a assisté avec délectation à un cours de danse (en Bolivie, tous les après-midis sont consacrés à des activités sportives ou artistiques). Imaginez notre étonnement à regarder un groupe d'adolescents, filles et garçons ensemble, jean et casquette à l'envers, en train de danser sur de la musique traditionnelle avec la plus grande concentration qui soit et sans aucun signe de désintérêt, de moquerie ou de rébellion !! Comparez avec le sérieux qui règnerait dans un cours de menuet en classe de 3ème chez nous et vous aurez une idée de la vivacité des traditions en Bolivie...
Côté architecture, Sucre et Potosi sont de très belles villes de style colonial, avec des façades blanches et des toits en tuiles pour la première, des ruelles étroites, sinueuses et colorées pour la seconde et de très beaux couvents et églises pour les 2.
A Sucre, on a visité entre autres la Casa de la Libertad, où a été signée l'indépendance de la Bolivie par Simon Bolivar et le Général Sucre (d'où les noms du pays et de la ville). Le 25 mai 1809, c'est aussi à Sucre que les mouvements indépendantistes sud-américains avaient éclaté. La ville était d'ailleurs en effervescence à notre passage car elle était en pleins préparatifs du bicentenaire de ce soulèvement. Mais quelques siècles plus tôt, aux 16ème et 17ème, l'histoire se jouait plutôt à Potosi qui était alors la ville la plus riche et la plus peuplée du monde ! L'économie espagnole était entièrement dépendante de l'exploitation du Cerro Rico, montagne dominant la ville et abondante en minerai d'argent. On estime que 8 millions d'esclaves indiens et africains y sont morts entre 1545 et 1825.
Aujourd'hui encore, les mines sont exploitées dans des conditions de travail extrêmement difficiles, à 4200 m d'altitude, et font 1 mort par semaine parmi les mineurs. On a pu visiter une des 400 galeries et voir quelques mineurs qui y travaillent en mâchant de grosses boules de feuilles de coca pour lutter contre l'altitude, mais aussi contre la faim, la soif, l'anxiété et la fatigue. Ceux qui ne meurent pas dans l'effondrement d'une galerie sont emportés par la silicose avant 50 ans, à force d'inhaler des poussières et des gaz toxiques. Dans un contexte aussi dur, les superstitions sont très fortes, comme en témoigne le Tio, une effigie du diable, gardien de cet enfer, censé les protéger et à qui l'on donne pour cela alcool, cigarettes et feuilles de coca.
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