samedi 23 mai 2009

Dessine-moi un volcan...

Après plusieurs jours forcés à La Paz, tous les 2 pris en otage par le gang des amibes, on a finalement pu partir vers le Chili. Quelques heures après un départ matinal en bus, nous voilà déposés seuls sur la route, à 5km du village de Putre. Un quart d'heure plus tard, un 4x4 nous dépasse, s'arrête, puis nous propose de nous déposer : trop sympas ces chiliens !

Putre, paisible petit village perdu au milieu des paysages désertiques de l'altiplano, sera notre camp de base pour visiter le Parque Nacional Lauca et ses volcans à plus de 6000 mètres d'altitude. Ils sont paraît-il assez faciles à gravir, mais pour notre part on se contentera de randonner au pied, à 4500m, ce qui essouffle déjà pas mal !

A Lauca poussent de curieuses et minuscules fleurs vertes qui tiendraient plutôt de la mousse et qui recouvrent les rochers au rythme d'1mm par an...

Le parc est aussi peuplé de nombreux animaux très exotiques, comme les viscaches, les vigognes et les alpagas.



Et à un contrôle routier, on a fait la connaissance d'un lama peu farouche venu nous taper la bise dans la voiture.

Il y a aussi beaucoup d'oiseaux, comme par exemple les Ganzos Andinos, des oiseaux sentimentaux qui vivent en couple : si l'un des deux meurt, le second ne lui survit pas plus de 2 ans ! Comme quoi, nous autres humains n'avons pas le monopole du coeur...

Mais la star incontestée du parc, c'est le volcan Parinacota. Si on vous demandait de dessiner un volcan avec de la neige au sommet, c'est sûrement lui que vous imagineriez tant sa forme est parfaite et régulière...




Il est entouré de 2 lagunes scintillantes, la Laguna Cotacotani et la Laguna Chungara et de plusieurs autres volcans encapuchonnés de neige, dont certains sont actifs. Paraît même, selon la légende, que celui qui est à côté de lui serait en fait sa femme et que comme un autre - qui plus est situé en Bolivie, l'éternelle rivale - lui aurait piquée, il aurait beaucoup pleuré et ainsi serait née la Laguna Chungara... La morale : faut s'méfier du volcan qui dort. La morale de cette morale : faut aussi s'méfier de son voisin.

On a terminé cette belle journée avec un bain dans des sources d'eau chaude près du village, ce qui a permis à Lionel de conjurer le mauvais sort après son malaise pendant le circuit des Lipez. Et puis le lendemain, on est partis pour Arica, ville frontalière avec le Pérou. C'était la première fois depuis 1 mois qu'on redescendait au niveau de la mer : c'est étrange d'avoir l'impression de découvrir le gazon et les champs cultivés autrement qu'en terrasse ! A l'arrivée, demandant notre chemin à un vieil homme, celui-ci a sans hésiter pris les clefs de sa Mercedes et nous a déposés à notre hôtel ! Décidément, ils sont vraiment trop sympas ces chiliens...

Arica est une ville plantée entre de gigantesques dunes d'un côté et l'océan de l'autre. Si elle n'est pas particulièrement jolie, il y règne une atmosphère décontractée et ensoleillée qui nous a permis de passer une bonne journée.

Mais la région est surtout connue grâce aux momies Chinchorros, les plus anciennes jamais retrouvées (plus de 2000 ans avant celles des égyptiens, soit 7000 ans avant JC !) et qui étaient faites selon un procédé très complexe pour des cultures aussi primitives.

Cette petite incursion chilienne, qui plus est en basse saison touristique, aura été vraiment agréable et reposante avec son ambiance à mi-chemin entre culture andine et culture européenne. Demain matin, on part donc revigorés pour la dernière frontière terrestre du voyage qui nous mènera au Pérou.

A bientôt !
Lionel et Virginie


dimanche 17 mai 2009

La Paix, le Soleil, la Lune

La Paz, capitale la plus haute du monde (3700m), prouve une fois encore que la Bolivie est le pays des superlatifs... A l'arrivée par la route – pour notre part, tout raides après une nuit glaciale dans un bus sans chauffage – elle apparaît soudainement, au détour d'un virage, s'étendant à flanc de montagne aussi loin que porte la vue... On a profité de cette ville surprenante, de ses ruelles coloniales, de ses marchés animés et de ses vues spectaculaires sur El Alto, un quartier haut perché, essentiellement peuplé d'indiens Aymaras et qui, vu d'en bas, ressemble à une immense mosaïque cubiste.



Entre autres activités typiques et insolites, on a visité le Musée de la Coca et le Marché des Sorcières. Dans ce dernier, on vend par exemple des fœtus de lama séchés, à placer sous les fondations de sa maison quand on la construit pour porter chance... On a aussi assisté un soir à une peña (spectacle de musique et de danses folkloriques) : bon, pour tout avouer, ce n'était pas aussi réussi qu'on l'espérait, puisqu'on va dire pour résumer qu'on s'est plutôt retrouvés dans un spectacle pour touristes principalement venus pour s'empiffrer au buffet et voir danser de jeunes et jolies boliviennes court-vêtues... Enfin, ça aura au moins eu le mérite de nous faire bien marrer !

Fatigués par ces dernières journées très urbaines et souvent polluées, on est ensuite partis se mettre au vert : direction le lac Titicaca donc, et d'abord Copacabana, sur ses berges. Mais ça aurait été trop simple d'y parvenir en 3h comme prévu... Au bout d'un quart d'heure, le bus est arrivé au niveau d'un embouteillage sur l'autoroute. Dans pas mal d'endroits du monde, quand ce genre de choses se produit, on attend sagement que ça se débloque. Et bien en Bolivie, c'est beaucoup plus simple : voitures, camions, bus, tout le monde fait demi-tour sur la même voie jusqu'à la sortie précédente ! Évidemment, ça a créé une sorte de gros blocage, mais tout le monde avait l'air de trouver ça normal, et encourageait même le chauffeur... Finalement, on est arrivés entiers à destination.

Avec moins de strings et de chaleur que chez son homonyme brésilienne, Copacabana ne manque pas d'attraits pour autant. Les vues sur le lac depuis les collines environnantes coupent le souffle une première fois quand on y monte... et une deuxième quand on arrive au sommet ! Devant l'église de la ville, se déroule presque tous les matins un étrange cérémonial : les gens, particuliers et chauffeurs des compagnies de bus, viennent ici pour faire bénir leurs nouveaux véhicules, décorés pour l'occasion de guirlandes de fleurs et copieusement arrosés d'alcool...

Décrire le lac Titicaca et même le montrer en photo est chose vaine. Avant d'y venir, on pensait bien que ça serait beau, mais on pensait aussi qu'un lac restait un lac et honnêtement, on ne pensait pas être subjugués plus que ça. En fait, il est trop grand pour être un lac comme les autres, mais trop paisible et trop petit pour ressembler vraiment à une mer... Avec ses changements de couleur et d'apparence selon l'heure de la journée, le faisant passer du bleu outremer au gris argenté, ses îles pelées parsemées ça et là et les sommets enneigés de la Cordillera Real à l'horizon, c'est réellement un lac unique et on comprend assez bien que les Incas aient pu le considérer comme sacré.





Notre arrivée à Yumani sur l'Isla del Sol était sportive, car le village est perché sur la crête de l'île. Il fallait monter par un ancien escalier Inca escarpé, sur un dénivelé de 200m, le tout avec nos sacs à dos et l'altitude ! Mais une fois en haut, belle récompense : de notre chambre (pour environ 11 euros), on avait la plus belle vue qu'on ait jamais eue d'un hôtel, avec un panorama à 180° sur le lac et les sommets. Un matin, on s'est même réveillés aux aurores pour admirer le lever de soleil, blottis sous notre couverture en peau de lama ! C'est pas tous les jours qu'on peut voir ça de sa chambre...

La contrepartie à toute cette beauté, c'était peut-être les coupures d'eau et d'électricité régulières et de plusieurs heures... Mais déguster à la lueur des chandelles une bonne pizza maison ou une truite élevée dans le lac fait oublier ces petits désagréments !

Un peu d' histoire maintenant... L'Isla del Sol, selon la légende, est à l'origine de la civilisation Inca, puisqu'elle serait le berceau du Soleil. Elle s'appelait alors Titi Khar'ka, nom d'où dérive celui du lac. On y a vu plusieurs sites, notamment le Palacio del Inca, un labyrinthe de pièces ouvertes par des portes en trapèze, ainsi qu'une table de cérémonie où se déroulaient probablement des sacrifices d'hommes et d'animaux... Brrr... Depuis l'île voisine, l'Isla de la Luna, le Dieu blanc et barbu Viracocha aurait ordonné à la Lune de s'élever dans le ciel. On peut y visiter les ruines – dont certaines très bien restaurées – d'un ancien couvent Inca qui abritait les Vierges du Soleil, des petites filles présentées en offrande au Soleil et à la Lune.



Ces îles offrent aussi de magnifiques randonnées avec des vues plongeantes sur le lac, les montagnes et les cultures en terrasses, tout ça dans une solitude et un silence bienfaisants et au milieu d'odeurs de plantes sauvages, de pins et d'eucalyptus (ce qui rappelle la Corse à Lionel, comme d'hab'). On a traversé de paisibles villages rythmés par une vie ancestrale et croisé cochons, ânes, chèvres (la Corse, encore !), moutons et lamas, conduits par des bergers. Enfin, les gens semblent heureux, ce qui est toujours agréable à voir...




Après ce petit paradis, on est revenus sur La Paz avec pour projet de repartir vers le nord du Chili pendant quelques jours avant de passer au Pérou, mais on dirait que la Bolivie a décidé de nous retenir un peu plus longtemps que prévu puisqu'on est tous les 2 bien malades depuis quelques jours...

dimanche 10 mai 2009

Un pays qui ne manque pas de sel... ni de Sucre

On vous a parlé la dernière fois du désert de sel d'Uyuni, notre goût nous a ensuite portés à Sucre, avec auparavant une étape de plusieurs jours à Potosi. On s'est acclimatés à l'altitude en mâchant des feuilles de coca, comme les locaux. Comme les locaux aussi, on s'est régalés de copieux almuerzos (entrée, soupe, plat, dessert) pour 1,50 euro maximum : à Sucre (comme à Potosi d'ailleurs), les additions ne sont pas très salées...

Plus sérieusement, dès notre arrivée en Bolivie, on a ressenti un gros décalage avec le Chili, bien plus riche. Exemple assez frappant : en nous promenant dans les rues, on vu à plusieurs reprises d'interminables files d'attente de gens patientant des heures devant les bureaux de la Western Union pour recevoir de l'argent envoyé par leurs familles...

Le pays est aussi très marqué par la culture indienne et 30% de la population ne parle pas l'espagnol... Dans les rues animées des villes, on voit partout des cholitas, femmes aux longues tresses, habillées traditionnellement avec chapeau melon, jupons bouffants, tablier, châle en laine et sur le dos, l'aguayo, un rectangle de tissu aux couleurs vives qui sert à porter toutes sortes de choses, des victuailles jusqu'au bébé ! Pour approfondir le sujet, on a visité un musée du textile à Sucre, où l'on a admiré les techniques ancestrales complexes des tisseuses de l'Altiplano.



Autres pans de la culture bolivienne : la musique et la danse. Lors d'une visite au cloître San Felipe Neri de Sucre, reconverti en collège, on a assisté avec délectation à un cours de danse (en Bolivie, tous les après-midis sont consacrés à des activités sportives ou artistiques). Imaginez notre étonnement à regarder un groupe d'adolescents, filles et garçons ensemble, jean et casquette à l'envers, en train de danser sur de la musique traditionnelle avec la plus grande concentration qui soit et sans aucun signe de désintérêt, de moquerie ou de rébellion !! Comparez avec le sérieux qui règnerait dans un cours de menuet en classe de 3ème chez nous et vous aurez une idée de la vivacité des traditions en Bolivie...

Côté architecture, Sucre et Potosi sont de très belles villes de style colonial, avec des façades blanches et des toits en tuiles pour la première, des ruelles étroites, sinueuses et colorées pour la seconde et de très beaux couvents et églises pour les 2.







A Sucre, on a visité entre autres la Casa de la Libertad, où a été signée l'indépendance de la Bolivie par Simon Bolivar et le Général Sucre (d'où les noms du pays et de la ville). Le 25 mai 1809, c'est aussi à Sucre que les mouvements indépendantistes sud-américains avaient éclaté. La ville était d'ailleurs en effervescence à notre passage car elle était en pleins préparatifs du bicentenaire de ce soulèvement. Mais quelques siècles plus tôt, aux 16ème et 17ème, l'histoire se jouait plutôt à Potosi qui était alors la ville la plus riche et la plus peuplée du monde ! L'économie espagnole était entièrement dépendante de l'exploitation du Cerro Rico, montagne dominant la ville et abondante en minerai d'argent. On estime que 8 millions d'esclaves indiens et africains y sont morts entre 1545 et 1825.

Aujourd'hui encore, les mines sont exploitées dans des conditions de travail extrêmement difficiles, à 4200 m d'altitude, et font 1 mort par semaine parmi les mineurs. On a pu visiter une des 400 galeries et voir quelques mineurs qui y travaillent en mâchant de grosses boules de feuilles de coca pour lutter contre l'altitude, mais aussi contre la faim, la soif, l'anxiété et la fatigue. Ceux qui ne meurent pas dans l'effondrement d'une galerie sont emportés par la silicose avant 50 ans, à force d'inhaler des poussières et des gaz toxiques. Dans un contexte aussi dur, les superstitions sont très fortes, comme en témoigne le Tio, une effigie du diable, gardien de cet enfer, censé les protéger et à qui l'on donne pour cela alcool, cigarettes et feuilles de coca.


Bises de La Paz, où on est arrivés ce matin !

lundi 4 mai 2009

Des Lipez au Salar d'Uyuni

Seulement un profond silence, le bleu du ciel, quelques volcans à l'horizon et une aveuglante mer blanche qui s'étend à l'infini : on a rejoint un de nos rêves sur le Salar d'Uyuni...

Parfois lisse, parfois rugueux, il est aussi parfois strié de craquelures le faisant ressembler à une toile d'araignée géante qui aurait été soudainement pétrifiée...

De manière plus pragmatique, c'est une étendue de sel plus grande que la Corse (seule référence acceptable !) qui se situe à plus de 3600m d'altitude. Bien qu'on en ait vu des centaines de photos avant le départ, la magie était intacte quand on y a posé le pied au lever du soleil.

Après quelques jeux avec la perspective, les ombres et quelques acrobaties, le soleil était déjà bien haut.




On est alors partis en 4x4 dans cet univers irréel où les montagnes semblent flotter au-dessus du sol !

Depuis l'Isla Incahuasi, située presque au coeur du Salar, on a écouté le silence, mesuré l'immensité autour de nous et rêvé à l'ancien lac qui s'étendait ici il y a 10 000 ans... Sur cette île isolée se trouvent des cactus multi-centenaires voire plus que millénaires. L'un d'eux, né peu de temps après le sacre de Charlemagne, mesure 12 mètres de haut ! On a d'ailleurs appris que les cactus grandissent d'1cm par an seulement et absorbent l'eau grâce à leurs piques.


Aujourd'hui, une petite partie du Salar est exploitée pour la consommation. Les ouvriers ratissent le sel et forment de petits dômes qui sèchent au soleil pendant 3 jours. L'eau qui s'en échappe se répand en miroirs autour de ceux-ci. Le sel est ensuite envoyé au village voisin de Colchani pour y être traité.

Mais avant d'atteindre le Salar, on a passé 2 jours dans les Lipez, l'une des régions les plus rudes de la planète. Le climat y est extrême et l'altitude rend les efforts difficiles. La première nuit, on a dormi à 4500m, tout habillés, dans un sac de couchage et sous 2 draps et 3 couvertures !! Le matin, la buée était gelée sur les vitres à l'intérieur de la chambre et le 4x4 ne démarrait plus car le moteur était gelé, lui aussi... On a finalement réussi à partir avec un autre véhicule vers les Lagunas Altiplanicas, entourées de hauts volcans de près de 6000m et plusieurs lagunes colorées, l'une blanche, l'autre verte et la plus impressionnante, la Laguna Colorada, toute rouge et peuplée de flamants roses.





La zone est géologiquement active : on a observé de loin les fumerolles du volcan Ollague et de près celles des geysers de Sol de Mañana. On s'est aussi baignés dans les sources chaudes des Termas de Polques, où Lionel nous a fait une grosse frayeur en tombant dans les pommes à la sortie de l'eau... Heureusement, rien de grave, juste un malaise dû à l'altitude et à la différence de températures.

La région est également un refuge pour de nombreuses espèces andines, notamment les viscaches, sortes de lapins à longue queue et les vigognes, apparentées aux lamas, mais bien plus jolies avec leur fine silhouette et leurs grands yeux aux longs cils.

Enfin, dans le style surréaliste, on a visité le Desierto de rocas de Salvador Dali, nommé comme ça car la nature semble ici s'être inspirée du fameux peintre espagnol, ainsi qu'un cimetière de vieux trains rouillés au milieu de nulle part.


Après 6h de dur trajet en bus dans les montagnes, on est maintenant à Potosi, plus haute ville du monde, à 4070m d'altitude !

A bientôt !